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El Rocío : Bienvenido al Oeste

El Rocío : Bienvenido al Oeste

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ne nationale bitumée à la sortie d’un parc national, quelques kilomètres parcourus et des zones sablonneuses qui parsèment notre chemin progressivement. Nous sommes en Andalousie, en direction de Séville. Soudain, un cheval, puis deux, trois. La piste est désormais uniquement composée de sable. Nous apercevons au loin un lac magnifique, sur lequel viennent, en ces heures tardives, se baigner des centaines d’oiseaux d’Afrique. La saison est presque terminée et l’heure de rejoindre les météos plus clémentes est arrivée. Nous ne savons pas pourquoi mais nous sommes à l’aise ici. Cela fait plusieurs jours que nous ne croisons âme qui vive. Cela nous pèse et nous désespérons de rencontrer des locaux, trop rares en ces terres oubliées de l’hiver.

Nous avançons à basse allure et tout semble étrange dans cette bourgade. Plusieurs cavaliers apparaissent ici et là et leurs présence est de plus en plus forte. Ou sommes nous ? L’architecture parait américaine, on se croirait dans un western spaghetti des années 60. Nous ne le savons pas mais nous sommes aujourd’hui à El Rocío. Surement un de nos coup de cœur depuis notre départ et le plus gros ovnis culturel. El Rocío se situe à une heure et demi de Séville mais offre une vision bien différente des clichés andalous répandus. La ville respecte une organisation américaine, quadrillée, simple. Les devantures de maison sont inspirées des petites villes du désert de l’Arizona au XIXe siècle. Toutes les routes sont composées de sable, ce qui ajoute à la touche « cowboy » bien présente depuis notre arrivée. Les 4×4 de luxe partagent ces pistes avec ici et là, des situations plutôt accidentogènes. La ville est en effet très cosmopolite. La jeunesse dorée de Séville vient passer les fêtes de fin d’année en famille dans cette bourgade qui garde en son sein, une population plus modeste, également très présente.

Que ce soit en calèche, en amazone pour les femmes ou en bandes de cavaliers mâles défilant dans les rues, exhibant fièrement leurs montures, l’amour de cet animal et la volonté de préserver leur art est très fort. Même les plus jeunes montent. On les aperçoit parfois se faire la course ou jouer de leur cheval, le cabrant dangereusement pour impressionner les filles. Certains cavaliers n’ont pas plus de sept ans et monte des purs-sang arabes adultes d’une puissance saisissante.

Un village sacré.

L’histoire d’El Rocío remonte au XVIII e siècle. Un berger aurait découvert une statue de la vierge au lieu dit El Rocina (aujourd’hui El Rocío) et l’aurait amené à Almonte. Le matin en se réveillant, la statue avait disparue pour réapparaître à El Rocina, à l’endroit exact où il l’avait trouvé. Aujourd’hui un sanctuaire somptueux se dresse au cœur du village d’El Rocío en l’honneur de la vierge…qui cette année, comme tous les sept ans est revenue exceptionnellement à Almonte. C’est ce qui explique la spiritualité qui émane des habitants de la ville et celle qui touche ses visiteurs. Les plus grands pèlerinages d’Espagne sont organisés tous les ans en l’honneur de la vierge qui repose dans le chœur de l’église. Nous ne pouvons assister et ces marées humaines ou aux lâchers de chevaux dans la ville mais dans notre malheur, nous sommes le 31 Décembre et quelques célébrations sont organisées pour le nouvel an.

Un concert de musique traditionnelle andalouse débute en soirée. Tous les habitants envahissent l’église et il ne reste aucune place disponible. Les gens sont debout, et tentent d’apercevoir les chanteurs et chanteuses qui donnent de la voix (et c’est peu dire). L’ambiance devient de plus en plus magique. Une chapelle ouverte au publique permet de brûler un cierge et de faire une prière. La salle en est remplie, il fait chaud, très chaud. Certains diront que c’est l’amour du tout puissant qui réchauffent les cœurs des malheureux en ces mois difficiles de fin d’année. Il réchauffe le notre en tout cas.

Une fois les cérémonies et concerts terminés, nous décidons de flâner en ville. L’ambiance y est festive. On boit, offre une balade à dos de poney pour les plus petits et on parade pour les plus grands. La nuit tombe son manteau ce qui n’empêche pas certains cavaliers de traverser la ville au galop, surprenant les bardots aux intersections de la ville. C’est de bonne guerre. Ils sont chez eux après tout et nous ne sommes que des vilains curieux, qui ne comprenons que trop mal le mode de vie de ces gens.

De retour à notre 4×4, nous entendons claquer des pétards. Les détonations sont de plus en plus puissantes dans la nuit et certaines se rapprochent du véhicule. Il nous est difficile de trouver le sommeil mais nous nous rappelons des jours précédant et suivant le nouvel an à la Réunion. C’est une coutume de l’île (vestige des coutumes chinoises et Indiennes) qui persiste encore aujourd’hui. On connait que trop bien ces nuits de guerre. A notre réveil, tout est calme. Quelques cavaliers traversent la ville mais tout nous laisse penser que les gens ont quitté les lieux. Les magasins sont fermés, les restaurants également… Nous restons très étonnés mais après avoir discuter avec les gens du coin, on comprend que le 1 Janvier se passe à la maison, en famille. Des familles parfois très nombreuses louent les maisons du centre-ville et passent les fêtes à l’intérieur. Personne ne sortira aujourd’hui. Après une soirée si excitante, nous nous sentons abandonnés. On se surprend à chercher des chevaux qui restent parqués devant les maison ou dans les parcs. Tampis pour nous, le souvenir restera gravé. Django est poussiéreux, dernière empreinte de cette ville que nous emportons avec nous. Le reste de l’Andalousie nous attend, ne la faisons pas attendre. Peut-être saura t elle nous surprendre à nouveau…

EL ROCÍO

 

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