Nos quelques jours de repos à Istanbul nous ont laissé le temps de nous interroger sur la suite de notre itinéraire. L’objectif est de remonter vers le nord pour y passer l’été, certes, mais quelle trajectoire privilégier ? La première option serait de traverser la mer Noire pour rejoindre l’Ukraine et la Biélorussie. Nul doute que ces pays auraient des merveilles à nous offrir mais pour éviter les enquiquinements divers, on se dit que retrouver l’Union européenne est plus que souhaitable.
Alors direction la Bulgarie. Nous traversons pourtant ce pays d’une traite, en une journée. Pourquoi donc ? Un rapide tour sur les informations aux voyageurs adressées par le ministère des affaires étrangères, additionné du passage en revue de quelques forums de voyageurs 4*4 : la destination n’est pas la plus recommandée pour nous et notre véhicule serait une cible privilégiée pour les vols ! Il ne nous en faut pas plus, de toute façon, nous devons faire des choix et ne pouvons pas nous permettre de visiter chacun des pays traversés si l’on veut rejoindre la Scandinavie au début de l’été.
À partir d’ici, le chemin le plus court aurait certainement été de prendre la direction de la Serbie. Mais bizarrement, nous choisissons plutôt d’écouter l’appel d’une terre de mythes et de légendes quitte à faire un détour. Les Carpates nous font de l’œil depuis le début de ce voyage. Comme une envie de forêt, de lac, de montagne… Nous partons nous mettre au vert sur un territoire au nom évocateur : partons à la découverte de la Transylvanie !
Nous traversons la frontière sous un grand soleil et prenons rapidement la direction des montagnes. Le ciel se couvre et se fait menaçant. C’est la météo que nous conserverons tout au long de notre séjour en Roumanie, au grand désespoir de Lucas. Pourtant, au pays des loups, des ours et du légendaire Vlad Tepes (alias Dracula), je trouve que cette grisaille est plutôt de circonstance…
Une envie nous titille depuis le début de ce voyage, c’est d’aller voir de plus près la Transfagarasan road, cette route de légende taillée dans les Carpates sous le régime de Ceausescu.
L’accès à la route est bloqué pour cause de course automobile. La pluie se fait de plus en plus épaisse. Nous attendons sagement au pied de la citadelle Poienari, la demeure du célèbre Vlad l’empaleur où flotte le drapeau roumain mais également des corps empalés en décoration à l’entrée. Le décor est posé.
C’est seulement à la tombée de la nuit que les autorités ouvrent l’accès à la route et nous permettent de démarrer l’ascension. Il se fait tard. Le bivouac du soir se fera à proximité du barrage, après une traversée de la forêt dans des sentiers boueux. Et au premier endroit où l’on décide de s’arrêter, c’est un panneau « beware of bears » qui nous attend ! La Transylvanie n’a pas fini de nous en faire voir de toutes les couleurs !
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Malheureusement, en ce début du mois de mai, la route est encore enneigée et donc fermée à la circulation avant le lac Balea que nous souhaitions atteindre. Nous nous arrêtons donc au terminus et improvisons sur place une petite promenade dans la neige, découvrant avec joie que notre petit royal bourbon n’est pas si frileux qu’il y paraît !
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Sur la route du retour, nous avons le privilège de croiser le chemin de ce jeune ours curieux qui s’approche de Django. Quelle rencontre pleine d’émotions ! Cet échange, bien que furtif, avec la faune sauvage des Carpates restera longtemps gravé dans ma mémoire…
Décidément, la météo se maintient au froid, à la pluie et au brouillard…Quoi de mieux pour aller explorer le château où fut emprisonné Dracula, avec la salle d’exposition sur les techniques de torture médiévale en supplément, tant qu’on y est ! Le château de Bran est tellement célèbre dans la région que la foule était au rendez-vous en ce lundi après-midi. Au final, la foule se presse pour Dracula, mais on en apprend plus sur la famille royale roumaine qui a occupé ce château que réellement sur le personnage de Vlad Tepes qui inspira le romancier Bram Stoker.
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Incontournable pour tout visiteur de la Transylvanie, nous avons également profité de la météo peu clémente pour aller à la découverte des villes médiévales de la région. Entre murs d’enceinte et tours de garnison, je crois pouvoir dire que nos centre-villes français de la même époque n’ont rien à envier à Brasov ou Sighisoara. Toutefois, c’est l’histoire de leurs origines qui m’intrigue. Ces villages saxons auraient vu le jour à l’initiative des voisins hongrois et allemands qui devaient faire fasse aux avancées des positions militaires turques et mongols…Alors on se plonge dans le règne de Gengis Khan et on comprend mieux pourquoi il fallait se montrer sanguinaire (allant jusqu’à empaler ces ennemis…) dans ce contexte.
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Pour mettre un point final à notre escapade roumaine, nous voulons revoir les ours bruns, comme celui croisé par hasard sur la Transfagarasan road, et nous choisissons de faire la visite de Libearty (http://bearsanctuary.com/libearty-bear-sanctuary), un sanctuaire qui recueille les ours victimes de maltraitance pour leur offrir une fin de vie décente. Ils sont 99 à Zarnesty. Seuls trois d’entre eux sont issus de leur milieu naturel. Tous les autres ont été recueillis suite à des signalements. La visite est rapide, un peu trop à notre goût, mais nous voyons plusieurs dizaines d’ours. Chacun a son nom, chacun a son histoire. J’ai les larmes aux yeux quand j’apprends qu’un photographe roumain a été capable de rendre aveugle un ours, de lui arracher les dents et de le droguer à l’alcool … Ou quand j’entends parler de suicide d’un ours s’automutilant. En fonction du vécu de chacun, la quarantaine peut durer quelques jours ou des années pour ceux qui n’ont jamais vu la forêt ou fréquenter des congénères. On quitte le site heureux d’avoir partagé ce moment sur le territoire des ours et d’avoir contribué, même si ce n’est qu’à notre échelle insignifiante, à la protection et au bien-être de ces animaux majestueux.
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Il est déjà l’heure de prendre la route de la Hongrie en espérant y trouver enfin un peu de soleil ! Mais nous nous autorisons une petite pause en cours de route aux environs de Turda. La ville est connue pour ses mines de sel… Mais son aménagement en parc d’attraction ne nous attire pas tant que ça ! On préfère se diriger vers ses gorges naturelles dans la réserve naturelle Cheile Turzii. La randonnée en elle-même ne nous a pas transcendé… L’entrée est payante ! Mais bon, on a réussi à passer au travers ! Spooky en a bien profité et c’est l’essentiel. Mais pour nous, ce sont surtout deux bivouacs de rêve au bord de la rivière, des pistes 4*4 peu empruntées, un passage à guet un peu périlleux et les moutons et les vaches qui nous entourent, comme toujours, que nous retiendrons ! On est toujours un peu amusés de voir des bus scolaires et des touristes débarqués au lieu-dit, qui se retrouve bondé, et de n’avoir que quelques kilomètres à faire pour se retrouver seuls au monde. C’est ça, les joies du overlanding !
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